Les pionniers
27 octobre 2013Retour à Djibouti après deux brefs détours par Paris et Berlin.
Nous avons publié récemment une série de belles cartes (coll. L Gérard) représentant les premières locomotives fabriquées pour le compte de la Compagnie Impériale des Chemins de fer Éthiopiens (CIE) par la Société suisse de construction de locomotives et de machines (SLM Winterthur – Schweizerische Lokomotiv-und Maschinenfabrik). La série portait des noms de grands animaux : la Buffle et l’Antilope, la Léopard, la Rhinocéros (ici et à l’arrêt dans une petite halte du désert abyssin).
La fabrique suisse, fondée en 1871 à Winterthur, dans le canton de Zurich, par l’ingénieur anglais Charles Brown (1827-1905), est réputée en Europe pour ses machines spécialisées pour les voies étroites de montagne. « En 1893 et 1894, elle conçoit et construit huit locomotives à vapeur combinées, crémaillère et adhérence, pour la section Beyrouth-Maallaka (puis Rayak) de la ligne Beyrouth-Damas » (source).
En 1899, la Compagnie Impériale des Chemins de fer Éthiopiens (CIE) commande à la Société de Winterthur six locomotives 130 à tender séparé. Quatre lui sont livrées avec les numéros de construction 1213 à 1216 (baptisées Lion, Léopard, Panthère, Buffle). Deux autres, un an plus tard. Ce sont les SLM 1224 et 1225 (Rhinocéros, Antilope).
On lit dans un rapport du Conseil de la CIE : « Votre Compagnie s’adressa à nos principales maisons de construction française, mais celles-ci, soit par suite d’engagements antérieurs qui les mettaient dans l’impossibilité de recevoir de nouvelles commandes, soit à cause de délais de livraisons impossibles à accepter de notre part, ne purent entreprendre cette fourniture. Votre Compagnie fut ainsi amenée à accepter les offres de la Compagnie Suisse de Winterthur et a passé avec elle un marché pour la fourniture de six locomotives de 26 tonnes avec tender, livrables dans le courant de 1899 au prix de 49.000 francs chacune ; les deux premières locomotives nous seront livrées le 15 juillet prochain » 1.
Sur cette carte postale reproduisant ce que je pense être une photographie d’Augustin Alavaill2 (dont je parlerai bientôt), on assiste au déchargement, grâce à la grue de la nouvelle jetée, du corps d’une chaudière de locomotive. On y lit distinctement la marque de la Société suisse de construction de locomotives et de machines Winterthur.
- ANOM, CFS, TP I, Carton 1070, dossier 4 : Rapport du Conseil, CIE, 20 juin 1899 (cité par Rosanna Van Gelder de Pineda, Le chemin de fer de Djibouti à Addis-Abeba, L’Harmattan, 1995, p. 274). ↩
- Fils de Justin Alavaill (né le 4 mai 1847 à Céret et mort le 22 avril 1903 à Marseille, commerçant, journaliste, co-fondateur du Républicain des Pyrénées-Orientales et de La Farandole, directeur du journal Le Djibouti, qui paraît entre février 1899 et octobre 1903). ↩
Bonjour Hugues,
Vous avez réussi a réunir sur votre blog une collection impressionnante de cartes anciennes sur et autour du CFE.
Comment les avez-vous trouvées ? J’ignorais totalement qu’il y en avait eu autant n’en ayant jamais vues sur les brocantes ou dans des livres. Vos commentaires sont également très instructifs et j’attends avec impatience la suite de vos articles 🙂
Très amicalement.
Bonjour Catherine,
l’âge d’or de la carte postale (les dix premières années du siècle passé) correspond aux débuts de l’aventure du chemin de fer parti de Djibouti et s’explique par l’usage que ces « pionniers » font alors de l’appareil photographique (Alexandre Marchand entre autres), par l’usage de la carte comme seul outil de correspondance (les pneumatiques coûtent très cher), et par les inventions techniques aussi (notamment de la reproduction mécanique des images photographiques). Cela explique en partie que l’on trouve beaucoup d’images, la production ayant été considérable, et certaines extrêmement intéressantes du point de vue documentaire et photographique. Je m’attache à publier celles-là sur le blog. Les cartes m’intéressent aussi beaucoup, vous l’aurez remarqué, pour les messages qu’elles véhiculent, qui sont eux-mêmes traces historiques (certaines cartes ont été rédigées et envoyées par des employés de la Compagnie). Une des raisons d’être du blog, qui s’inscrit dans la suite de la publication du livre, est de donner à voir ces documents (on pourrait envisager plus tard une sorte de publication numérique, qui serait un volume II de « Un Train en Afrique »), qui sont aussi, parfois (et c’est une autre des raisons d’être du blog, et un plaisir à le rédiger) occasions de digressions, d’excursions.
Merci à vous de votre fidélité ; au plaisir de vous revoir bientôt.
Amicalement, H
Serge Magallon m’envoie un commentaire très intéressant sur l’article http://www.africantrain.org/point-dorgue ainsi qu’une série de timbres du Centenaire que je publierai dans les jours prochains dans un billet spécial. Il m’apprend aussi que son exposition philatélique « Les Postes Militaires italiennes pendant la Guerre d’Abyssinie » a reçu la médaille de grand argent à Béziers. Félicitations.