Train de plaine

3 juillet 2015 Par hugfon

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Les lecteurs attentifs du blog attendent peut-être la parution de l’ultime épisode du feuilleton Le roi de profil et portant couronne dont la dernière livraison remonte au 1er mars dernier. Déjà ! C’est qu’il m’est assez difficile de mener depuis Paris, comme je le souhaiterais, l’enquête sur les couronnes portées par Ménélik II, et cette question pourtant est au cœur des interrogations.

En attendant, et pour les faire un peu patienter encore, voici une petite médaille commémorative du chemin de fer de plaine, comme le dit le texte : yä-mǝdǝr : babur:massabbäbiya : : 1.

Sur l’avers, le buste de Ménélik II couronné à droite ; sur le revers, une locomotive à vapeur à gauche ; à l’exergue, la date de 1895, dans le calendrier éthiopien, qui correspond à 1902/1903 ; puis une corne avec le mot BRONZE. Le flan est mat. Une bélière (anneau de suspension). Bronze, 17,25 g. 32,0 mm.

Le conservateur du musée Coty 2 me confirme qu’il s’agit bien d’une œuvre du graveur Jean Lagrange, qui a réalisé les thalers Ménélik en 1893 (voir ce billet). Si le profil du roi semble bien avoir été dessiné à partir du même modèle, la couronne change et l’on notera que dans les deux cas la croix qui coiffe chacune des couronnes est parfaitement visible, car orientée dans l’axe du profil, ce qui est vraisemblablement une adaptation de la réalité.

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Pour ce qui est de la locomotive, Jean-Pierre Crozet en reconnaitra certainement le type. C’est peut-être la Brave, la locomotive fabriquée par la société suisse SLM de Winterthur, photographiée par Alfred Ilg.

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« Locomotive de notre train de Djibouti à Diré-Daoua avec la famille Ilg. » – Photographie Ilg – VMZ.800.16.001 (légende de Madame Zwicky). Avec l’aimable autorisation du Musée d’ethnographie de l’Université de Zurich, Suisse (Völkerkundemuseum der Universität Zürich, Schweiz).

On peut penser que la médaille commémore l’arrivée du train à Diré-Daoua en décembre 1902, terme du premier tronçon. Quel rôle remplit-elle, en associant la figure royale des timbres et des pièces de monnaie avec celle du train, représenté par la locomotive ? Les déboires de la Compagnie impériale des chemins de fer éthiopiens, créée par Ilg et Chefneux en août 1896, contraignent l’État français à soutenir financièrement l’entreprise privée qui risque de tomber aux mains des Britanniques (convention Bonhoure-Chefneux de février 1902). Cela ne se fait pas sans heurts et Ménélik s’en irrite, qui réagit à cette menace contre la souveraineté éthiopienne en refusant que se poursuivent les travaux sur le deuxième tronçon. La médaille, frappée à Paris, servirait-elle à arrondir les angles ?

profil

Train de plaine, l’expression en amharique dit bien la nature du profil de la voie, en ascension douce depuis la frontière éthio-djiboutienne jusqu’à l’altitude de Diré-Daoua (1220 m), construite sur les piémonts d’Harar, terme originellement fixé pour la ligne, mais dont Ménélik avait accepté (le 5 novembre 1896) qu’il soit abandonné, parce que trop coûteux et techniquement difficile à atteindre.

La montagne, c’est pour plus tard ! Et les travaux du tronçon B ne reprendront qu’en janvier 1910.

Ajout du 6 juillet

Jeton

Je trouve sur un site de numismatique un jeton en étain avec les mentions suivantes, qui semble avoir pu être transformé en médaille, par l’ajout d’une bélière, comme la pièce en bronze que je possède. Il n’y plus dans ce cas le motif de la corne ni le mot bronze.

Métal : étain
Diamètre : 32  mm
Axe des coins : 12  h.
Tranche : lisse
Poinçon : sans poinçon

Serge Magallon me signale cette information complémentaire. Merci à toi. (Source.)

Médaille commémorative train

 

Notes

  1. Je remercie Serge Dewel pour ces précisions.
  2. Je remercie P.M. Chantereau, Conservateur du Musée Oscar Roty, qui me confirme qu’il s’agit bien d’une médaille gravée par Jean Lagrange et non par Oscar Roty, l’auteur de La Semeuse.